Cette saison, designers et maisons de couture opèrent un retour aux sources : exit les excès et les ornements, place à l’essentiel, au pratique, au dépouillé.
Le constat est clair : la mode renoue avec l’essence même du vêtement, avec ce qu’il incarne dans sa forme la plus directe. Déjà, lors de la Fashion Week homme automne-hiver 2023-2024, les défilés laissaient entrevoir les prémices d’une nouvelle sobriété. Vestes ajustées, manteaux structurés, pantalons à pinces qui affinent la silhouette, t-shirts portés avec une simplicité assumée… Chez Bottega Veneta, Gucci ou Prada, le message était limpide. L’heure est au confort et à la fonctionnalité — deux piliers que les maisons de couture souhaitent désormais placer au cœur de leur démarche.
S’habiller, tout simplement — voilà ce qui compte.
En 2023, la mode amorce un retour marqué vers une “normalité” vestimentaire assumée, donnant naissance à une nouvelle génération de normcore. Si cette esthétique, popularisée dans les années 1990 par des figures comme Jerry Seinfeld ou Carolyn Bessette-Kennedy, visait à fondre l’individu dans la masse, elle prend aujourd’hui une tournure plus affirmée. Ce normcore nouvelle version célèbre une sobriété chic, héritée notamment de l’élégance discrète de Phoebe Philo à l’époque Céline.
Résultat : un minimalisme raffiné, teinté d’une vibe Old Money, s’est imposé sur les podiums de Paris à New York, en passant par Milan et Londres. Une mode dépouillée, mais jamais négligée.
Chez Miu Miu, on interrogeait la féminité à l’aune de 2023, explorant ses multiples facettes avec subtilité. Gucci, de son côté, rendait hommage au savoir-faire maison, mettant en avant l’imaginaire et les mains derrière les créations à travers des looks épurés, libérés de toute ornementation superflue. Prada revisitait les grands classiques du vestiaire masculin en jouant sur la structure même du vêtement, tandis qu’Ami misait sur l’authenticité des coupes et des silhouettes décontractées, où chaque détail compte.
Le mot d’ordre ? La priorité donnée au portable, au quotidien, à l’essentiel. Ce grand retour du minimalisme — voire de la banalité assumée — n’a rien d’absurde. Du point de vue des consommateurs, il est souvent plus rassurant et pratique de choisir des pièces sobres, socialement acceptées, faciles à intégrer dans une garde-robe. Une esthétique simple et fonctionnelle l’emporte sur les vêtements statement, plus audacieux, mais dont l’attrait peut s’estomper aussi vite qu’il est apparu.
Pourquoi ce retour vers une mode plus essentielle ? Les réseaux sociaux n’y sont pas étrangers. Comme l’explique Lily Miesmer, cofondatrice et designer chez Interior, dans un entretien accordé à i-D : « L’économie du clic a aplati la mode. Elle privilégie désormais le choc visuel, l’effet immédiat, au détriment du portable. » Sur Instagram, l’œil est naturellement attiré par ce qui surprend, ce qui buzze, quitte à s’éloigner du réel et du quotidien.
Dans ce contexte, revenir à des fondamentaux vestimentaires — simples, durables, portables — agit presque comme une respiration. Une manière de réconcilier style et authenticité.